Qui se souvient de … ? Ruby

Il est rare de ma part de poser cette question pour un groupe possédant encore une actualité récente, mais qui se souvient du projet Ruby ? Né en 1995 de la collaboration entre Lesley Rankine et Mark Walk et nommé ainsi via le prénom commun de leurs deux grands-mères maternelles, il représente la renaissance artistique de la chanteuse écossaise qui venait alors de se séparer du groupe Silverfish. Elle décrit en interview une envie d’aller voir ailleurs, géographiquement comme musicalement. Et comme cette fée aux cheveux bleus ne fait apparemment rien comme les autres, c’est à Seattle, capitale du mouvement injustement nommé « grunge » qu’elle enregistre Salt Peter, petit bijou totalement influencé par la déferlante trip hop de son époque. Enregistré dans un studio joliment appelé « Mommy’s Cunt » (nous ne traduirons pas), il est le résultat de sept mois d’un travail minutieusement effectué par Lesley et Mark de Skinny Puppy, précédemment rencontré lors de la production d’un album de Pigface. Sept mois durant lesquels les deux artistes ont façonné les sonorités diverses de cet album. Parfois au point de ne pas sortir durant plusieurs jours d’affilée. A raison car le résultat est tout simplement sublime. L’énergie du rock y côtoie des sonorités électroniques, la candeur de la pop flirte avec des samples jazzy et la noirceur du rock industriel épouse une voix enjôleuse, bien loin des hurlements d’un Al Jourgensen ou d’un Trent Reznor. Salt Peter n’est pas vraiment un album facile d’accès, mais il parvient tout de même à nous séduire une fois la glace brisée, voire à nous hypnotiser complètement. Il se réécoute même avec grand plaisir 25 ans plus tard.

Il y eut un album de remixes en 1996: Revenge, The Sweetest Fruit et un EP de six titres intitulé Revert to Type en 2013 ainsi que des tournées aux Etats-Unis jusqu’en 2016. Bien que toutes les oeuvres qui ont suivi Salt Peter n’aient pas eu le même charme et donc le même impact sur le public, il n’empêche que ce dernier suit encore religieusement les pas de la géniale Rankine de nos jours. Elle avait donc raison en disant lors d’une interview, qu’elle avait l’impression que la musique de Ruby avait une dimension internationale, ouverte sur le monde, ne s’adressant à personne en particulier mais à tous en général. Elle avait beau finir cette déclaration avec humour en se décrivant comme une « vieille hippie pénible », il faut admettre qu’elle ne pouvait pas se rapprocher plus de la réalité. Une bonne occasion, s’il en fallait réellement une, de se plonger dans son univers, en particulier pour celles et ceux qui ne l’ont jamais exploré, pour comprendre et s’imprégner corps et âme de ce sentiment d’universalité.

Sandra Cillo

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