La période berlinoise de David Bowie

L’avantage avec David Bowie c’est qu’il a fait tellement d’albums qu’il y en a forcément un que vous aimerez. Personnellement je suis tombé fou amoureux de sa « Trilogie Berlinoise » et plus particulièrement de « Low » premier album de cette trilogie. Seulement à mon sens cette période de Bowie ne se limite pas qu’à trois albums.
Il faut déjà revenir au dixième album du chanteur pour remettre le contexte avec  « Station to Station » sorti en janvier 1976 dans une période très compliquée de Bowie due à sa sur consommation de cocaïne, à tel point qu’il dira plus tard n’avoir gardé aucun souvenir des séances d’enregistrement et ignorant même la ville où il habitait à cette époque. Toujours en est il que « Station to Station » est un super album de transition gardant encore le côté Soul de « Young Americans » l’album précédent, tout en rajoutant une touche de Krautrock inspiré par les allemands Kraftwerk ou encore Neu! Ce sera plus tard la marque de fabrique de la trilogie berlinoise.
Cet album et Isolar Tour , la tournée qui suit, seront l’occasion pour Bowie de créer son dernier personnage, après Major Tom, Ziggy Stardust, Aladdin Sane, et Halloween Jack. C’est au tour du Thin White Duke personnage froid et limite fasciste fortement inspiré de son personnage dans le film The Man Who Fell to Earth dans lequel il joue un extra terrestre en visite sur terre (c’est d’ailleurs ce même extra terrestre qui sera sur la pochette de Low un an plus tard).
De cette tournée reste l’album live sorti deux ans après la mort de Bowie, « Live Nassau Colisseum ’76 » qui reste très bon malgré une qualité sonore pas toujours au rendez-vous sur certains morceaux.
Pendant ce temps Iggy Pop n’a plus de groupe après la séparation des Stooges, il fait d’abord un album en commun avec Ray Manzarek ancien membre des Doors, malheureusement pour lui l’album ne trouvera aucune maison de disques et ne sera publié que des années plus tard.
Appauvri et complètement dépendant de l’héroïne, il passera une année en hôpital psychiatrique afin de combattre son addiction à la drogue. Durant cette période obscure il recevra à de nombreuses reprises la visite de David Bowie, une amitié qui peut paraître étonnante vu les styles musicaux très différents des deux chanteurs (cela s’explique en partie par le fait que c’est Bowie qui a produit Raw Power, dernier album des Stooges).
Bowie décidera finalement d’inviter l’iguane avec lui dans sa tournée Isolar Tour.
La tournée finie les deux musiciens s’exilent en Europe dans un appartement de Bowie afin de produire le premier album solo de Iggy Pop et le onzième de David Bowie, respectivement The Idiot et Low.

The Idiot sous la tutelle de Bowie s’éloigne énormément du style garage rock et punk des Stooges pour explorer une musique plus sombre qui sera plus tard les bases de la Cold Wave pour des groupes comme the Cure et Joy Division (The Idiot sera d’ailleurs 3ans plus tard le dernier album écouté par Ian Curtis avant ses dernieres crises d’épilepsie et son suicide).
Avec des morceaux comme Sister Midnight, Nightclubbing, et China Girl dans l’album, il est pour moi l’un des meilleurs d’Iggy Pop.
Enfin à titre plus anecdotique on peut noter la présence du bassiste Laurent Thibault et du batteur Michel Santangeli connus plus tard pour être les musiciens de Jacques Higelin.
Malgré le succès commercial et critique de The Idiot, certains attribuent sa réussite à l’énorme aide de David Bowie. L’iguane choisira alors de faire un second album toujours avec l’aide de son ami mais dans un style légèrement plus punk rappelant ses débuts avec les Stooges. C’est seulement 6 mois après la sortie de The Idiot que sortira donc Lust For Life, qui est incontestablement un de ses meilleurs albums avec des compositions comme The Passenger ou encore la chanson titre.
Néanmoins entre ses deux albums j’aurais tendance à préférer le premier opus The Idiot et son univers qui ne ressemble à aucun autre.
Aucun autre excepté son cousin Low, car en parallèle de produire les albums d’Iggy, David Bowie ne chaume pas et crée un album tout simplement magnifique (c’est d’ailleurs mon album préféré de tous les temps juste après Stup Religion de Stupeflip, mais ça c’est une autre histoire). Fortement influencé par son travail sur The Idiot et le Krautrock en général cet album signe le vrai début de sa période berlinoise et par la même occasion le début de sa collaboration avec le producteur Brian Eno.
On peut diviser l’album en deux parties bien distinctes, la face A avec des morceaux dans la continuité de The Idiot, avec Iggy au chœur. Des paroles très vagues et imagées permettant une libre interprétation à chacun. Le tout sublimé par une musique expérimentale avec une omniprésence d’une batterie avec un son assez unique.
Et une Face B remplie de bruit ambiant influencé par la présence de Brian Eno et de ses voyages en Europe de l’est. On sort complètement du registre habituel de Bowie pour voyager et rêver au rythme de sa musique.
Plus tard Ian Curtis nommera d’ailleurs son groupe « Warsaw » en hommage au premier morceau de la face B  de Low : « Warszawa », avant d’ensuite le rechanger pour Joy Division.
Enfin bref si il existe un album que je peux vous conseiller d’écouter c’est bien Low, un magnifique chef d’œuvre dont vous ne vous lasserez sûrement jamais.
Bowie ne fera pourtant aucune promotion pour son album préférant partir défendre The Idiot et Lust for life avec Iggy Pop en tournée, se chargeant des chœurs et du clavier lors des concerts.
De cette tournée restera l’album Live « TV Eye Live 1977 » sonnant très punk, et sûrement mixé d’une façon très punk aussi, pour pas dire presque inaudible. Cette album clos ce que je me plais à appeler la trilogie Bowinoise d’Iggy Pop. Bien que David Bowie aura encore l’occasion d’aider son ami dans le futur en produisant par exemple son album Blah blah blah en 1986 ou encore en reprenant « China Girl » en single lors de sa période Let’s Dance afin qu’il touche les droits d’auteur.
De son côté Bowie est de retour en studio pour produire Heroes, album qui sortira pile 10 mois après son grand frère.
Et là on s’attaque encore à un gros morceau vu l’album qu’est Heroes.
Seul véritable album enregistré à Berlin et même en Allemagne de sa période berlinoise, il continue dans la lancée expérimentale avec des morceaux ambiants influencés par Brian Eno ou même des morceaux chantés en allemand.
Mais à la différence de Low, Heroes est beaucoup plus accessible avec des très bons singles comme « Beauty and the Beast » ou encore « Sons of the Silent age » que je vois comme une fierté pour la Belgique par ses paroles inspirées du style d’écriture de Jacques Brel.
Mais si on ne devait garder qu’un seul morceau de cet album, voire même de toute la discographique de Bowie c’est bien le morceau titre « Heroes », musique que tout le monde connaît. Elle est à mon sens une des meilleures sinon la meilleure chanson de tous les temps.
Musique parlant d’amour, d’oppression, d’alcoolisme, du mur de Berlin, de dauphin…
Je n’arriverais jamais à avoir les mots pour décrire ce chef d’œuvre donc allez l’écouter il parlera par lui même.
« We can be Heroes, just for one day ».

A la suite de cet album Bowie choisira quand même d’en faire la promotion, cela donnera l’incroyable tournée mondiale de 78 dates, le Isolar II Tour aussi appelé, Stage Tour, jouant des morceaux de presque tous ses albums (7 sur 12) et incluant même les pièces instrumentales de Low et Heroes.
En septembre 1978 sortira « Stage » album live de cette tournée qui a mon sens aurait complètement eu sa place dans la trilogie Berlinoise rajoutant une vrai dimension supplémentaire à certains morceaux.
Après la mort de l’artiste sortira aussi l’album « Welcome to the Blackout (Live London ’78) » très similaires à « Stage » avec un mixage des basses plus claires que j’aime moins.
(On peut d’ailleurs à mon sens comparer ces deux lives et leurs mixages différents avec Delicate Sound of Thunder et P·U·L·S·E des Pink Floyd).
A peine remis de sa tournée, Bowie est de retour en studio pour enregistrer le troisième est dernier volet de sa trilogie Berlinoise.
C’est donc le 18 mai 1979 que sort son treizième album « Lodger ». Épisode le moins connu des trois, il sera d’ailleurs le moins bien reçu lors de sa sortie. Abandonnant les morceaux ambiants omniprésents dans Low et Heroes, Bowie ne délaisse pourtant pas son approche expérimentale avec l’aide de Brian Eno. Cela donne un disque avec un son unique et encore une fois inédit pour David Bowie, incorporant de la musique du monde sur des morceaux comme « Africain Night Flight » ou encore « Yassasin ». et des très très bonnes compositions comme « Boys keep swinging » et « D.J » que j’adore, ou « Red Money » qu’on croirait sorties de Low deux ans avant.
Après les deux albums très sombres que sont Heroes et encore plus Low, lodger apparaît comme une éclaircie dans la discographie du chanteur, virage qu’il prendra complètements après cet album. Bien qu’il soit le moins bon de la trilogie à mon sens Lodger reste l’un des meilleurs albums de David Bowie.
C’est donc finalement avec cet album que finit ce qu’on peut appeler sa période berlinoise. Un an après sort Scary Monsters (and Super Creeps) album changeant complètement de style avec des morceaux New wave et une touche pop beaucoup plus accessible. Il sera le dernier album comportant les mêmes musiciens depuis Station To Station, on y retrouve d’ailleurs le même son de batterie si unique de cette période.
En conclusion je vous invite fortement à découvrir où redécouvrir cette période si importante de la discographique de David Bowie, qui sera plus tard une des plus grandes références pour Joy Division ou les Cure ainsi que toute la période Cold Wave qui en découlera.
Brian Eno quant à lui aura encore l’occasion de retravailler avec Bowie 15 ans plus tard sur l’album 1. Outside. Très bon album de la dernière partie de la discographique de l’artiste, bien qu’il soit très différent des expérimentations berlinoises.

Baptiste Pegurier

 

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L’Oreille Qui Gratte prépare sa rentrée

« Dans le rock il y a les Rolling Stones et L’Oreille Qui Gratte ».
 
Voilà ce que l’on m’a dit cet été. Cela m’a bien sur fait sourire mais soyons honnêtes m’a flatté aussi. Comme le dit Mick Jagger « Quelque chose de bien ne se termine jamais ».
 Au moment où la plus vieille émission de pop rock de France lance sa 27e saison nous avons tous une pensée pour Charlie Watts qui vient de nous quitter.
Comme tous les acteurs culturels nous souffrons depuis 1 an et demi des restrictions dues à la pandémie. C’est dire si nous piaffons d’impatience de retrouver une vie normale
 
L’Oreille Qui Gratte est dorénavant le rendez vous du samedi soir d’Agora Cote D’azur. Notre concept lui n’a pas bougé nous recevons un groupe qui en plus d’une interview se prête à la règle de la session acoustique, le tout agrémenté de nouveautés issues du rock indépendant ou de la scène locale
 
Si cela vous tente de nous retrouver derrière notre micro merci de nous envoyer un lien musical ici redaction@loreillequigratte.com
 
La 27e saison démarrera sur les ondes d’Agora le Samedi 4 Septembre à 20h avec The Landscape Tape en live
Pour compléter nos émissions nous nous retrouvons aussi tous les mois à la Zonmé (Nice) pour des concerts que nous organisons avec la fine fleur de la scène locale.
 
Voici nos prochaines dates :
Le Samedi 25 Septembre avec OG Auks; Selina Martin & Adri 
Le Samedi 16 Octobre avec The Landscape Tape; Pumba & The Papa’s & Micky Wild
Le Samedi 20 Novembre : Programmation à venir
Le Samedi 11 Décembre : Programmation à venir
 
Je vous donne donc rendez vous à ces occasions
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Gaël Faye : Vendredi Méchant

Il y a un an je m’étais amusé à faire le top 10 de mes albums préférés de l’année 2020. Après Népal et Bolivard (dont j’ai déjà eu l’occasion de parler) j’avais classé en 3ème position l’incroyable album Lundi Méchant de Gaël Faye. 
Après la claque incroyable que je m’étais prise avec son album Pili Pili sur un croissant au beurre j’attendais de pied ferme son deuxième album.
Et j’ai bien fait d’attendre Lundi méchant est un chef d’œuvre dont je ne saurais vous conseiller d’écouter par sa justesse d’écriture.
Qu’on soit d’accord Gaël Faye fait du hip-hop. Mais du très bon hip-pop, troquant les habituels rythmes et production propre au rap avec un vrai univers sonore rappelant tout droit son pays  natal le Burundi. Le tout sublimé par des paroles si bien écrites allant jusqu’à citer du Brassens et d’autres références des grands compositeurs français,  rôlant la poésie Gaël Faye a un style presque Baudelérien par moment.
Et bref vous avez compris je pourrais parler de lui pendant des heures. Imaginez donc ma joie quand j’ai vu qu’il était en tournée et qu’il jouait dans la région.
Après des négociations avec mon père qui se sont avérées en réalité très courtes, nous voici arrivés au Thoronet pour le
festival des nuits blanches. Et la première impression je dois l’avouer est que le lieu est magnifique, petite place de village avec devant la scène et juste derrière la mairie et église.
Peu de temps passe et arrive sur scène Blick Bessy, artiste initialement prévu pour jouer aux Nuit du sud mais qui a malheureusement attrapé le covid… c’est donc au Thoronet que j’ai eu la chance de voir cet artiste de musique africaine très expérimentale, une magnifique découverte.
Spectacle terminé le groupe de fanfare local vient jouer dans le public afin de mettre l’ambiance et faire patienter, pendant que les techniciens installent la scène pour Gaël Faye.
Fanfare disparue Gaël Faye apparaît sur scène en chantant la chanson titre « Lundi Méchant » et directement je sens la
foule qui transpire la joie et la communion avec le rappeur. La soirée s’annonce bien.
Les morceaux s’enchainent et le public est de plus en plus à fond, c’est assez dingue le talent qu’il a pour propager de la bonne humeur même avec des chansons pour la plupart tristes. Et la tristesse il sait en jouer malgré tout, je dois bien avouer avoir eu les larmes aux yeux lorsque il a joué « C’est Cool » ou encore « NYC » et ce mythique sample de C.R.E.A.M du Wu-Tang, joli hommage musical pour le hip-hop
New-Yorkais du début 90. Mais ce moment de spleen est vite passé avec l’enchaînement de « Histoire d’amour » et un micro qui passe dans le public pour faire chanter tout le monde. Au final c’est bien universel les histoires d’amour. Mais de toute l’énergie dégagée dans les morceaux. Je retiendrais plus que tout le morceau « Boomer » où pour l’occasion la scène du festival du Thoronet s’est transformée en dancefloor avec une vingtaine de personnes de la foule qui sont montés danser avec les musiciens, « Fais boumer les boomers ».
Gaël Faye à su nous faire voyager et rêver avec sa bonne humeur et son énergie, dommage que nous n’étions pas un Lundi, mais je
peux quand même affirmer que cette soirée était un vendredi méchant.
 

Baptiste Pégurier (Chronique; Photo & Video) 

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