Ceux qui avaient moins de 15 ans en mai 1968 et qui nous expliquent savamment, aujourd’hui, cette période, devraient plutôt éviter. ..Ils ne peuvent saisir le sel de cette ambiance unique dont ils n’ont pas vécu le contexte.
Il faut remonter fin 1967. Aux USA on est en pleine période Hippie, c’est toujours la guerre au Viet Nam, et c’est la « Guerre froide » entre l’Est et l’Ouest, mais l’information libre, n’est pas de mise il faut vraiment fouiller où l’on peut. En France il n’y a que deux chaines de télévision (d’état) en noir et blanc, et la presse écrite mais avec, mais la censure veille et étend sa chape de plomb.
En 1967, un choc : on apprend la mort du Che…déjà une icône…Assassiné ? Par qui ? On ne le saura jamais vraiment.
Et en 1967, un énorme pas : dépénalisation de la pilule contraceptive mais pour l’avortement on verra plus tard !
Mais pour le jeune avide de culture et de musique c’est plutôt la disette ; quasiment rien pour lui, l’info se résume à quelques magazines : c’est la fin de Disco Revue, la fin de Salut les Copains , heureusement arrive Rock & Folk seule revue musicale intéressante. Rien à la radio sauf le Pop Club de José Arthur à une heure tardive et un brin élitiste, et bien sûr, rien non plus à la télé !
Si on va chez le disquaire on ne trouve que de la variété française, du Yéyé et un peu de Jazz. Pourtant grâce au bouche à oreille on arrive à être informé de la sortie de certains disques Anglos- saxons. Pour cette année 1967 on a pu écouter bien sûr les Beatles – Sgt Pepper, les Stones – Let spend the night together, on entend Simon & Garfunkel (Mrs Robinson), Otis Redding, James Brown, the Yardbirds, et John Mayall…mais pour se procurer ces disques il faut aller sur Paris dans des officines spécialisées dans l’import comme le Lido Musique ou le Discobole.
Je rappele que les disques estampillés 1967, on ne les connaitra vraiment qu’en 1968 ou même en 1969 car à l’époque il faut du temps. Pas d’ordinateurs ni d’internet, on ne trouve pas de disques facilement, on se les passe sous le manteau, et les disques on les enregistre sur un support révolutionnaire apparu il y a peu, le mini k7 ; l’enregistrement n’est pas très bon mais quelle facilité, donc qu’importe !
Au cinéma on aura la chance de voir The Graduate, Le bal des vampires, On ne vit que 2 fois, par exemple.
Puis 1968 en plein « printemps de Prague » où un vent de liberté souffle sur la Tchécoslovaquie, mais sera sévèrement réprimé. On vient aussi d’apprendre l’assassinat de Matin Luther King, un vrai choc !
Dans ce contexte, en France des étudiants libertaires se révoltent et demandent des comptes aux adultes, les travailleurs, eux, ne se sentent pas encore concernés. Il faut noter que dans les manifestations et émeutes du quartier latin il y a « en face » la police et l’armée mais aussi des militants d’extrême droite du mouvement Occident avec certains jeunes qui viennent casser du gauchiste et qui feront pourtant carrière en politique et en devenant ministres.
Du côté de la culture on aura vu des films comme Bonnie & Clyde, Le Bon la brute et le truand, In the heat of the night…Pour la musique on peu se procurer James Brown (Say it loud) Aretha Franklin (Chains of fools) Creedence C R (Susie Q) Jimmy Hendrix ou The Who – On commencera à entendre parler de Pink Floyd, du Velvet, des Doors dont les disques ont une diffusion plus que confidentielle et la dont la notoriété arrivera bien plus tard. Bien sûr cette liste est la mienne et peu exhaustive.
Et mai 1968, avec les « évènements » manifestations, l’occupation des universités, des usines, les grèves, la paralysie du pays, et l’immense espoir… Il en restera de nombreuses avancées sociales (+ 35 % pour le SMIG et + 10 % pour les salaires, 4eme semaine de congés payés) Culturellement : remise en cause de la « société de consommation » Le féminisme apparait et l’on peut parler d’« amour libre ».
Mes slogans préférés : Il est interdit d’interdire – soyons réalistes, demandons l’impossible – le pouvoir c’est nous.
Nous étions jeunes et nos valeurs ont été : Insouciance, spontanéité, invincibilité. C’est « mon » mai 68