« C’est ce moment-là qui fait que tu sens que t’es en vie »

Comment Je Me Suis Dispute (Ma Vie Sexuelle) d’Arnaud Desplechin

Le plus grand plaisir que je continue à éprouver, même quand j’suis malheureux – Je me suis encore foutu dans une impasse où je peux plus bouger – mais y’a un truc qui veillit pas, c’est l’étonnement. Quand je mets ma main dans la culotte d’une fille que j’connais pas pour la première fois.

A chaque fois, ça fait peur. C’est l’étonnement toujours différent. Et puis, c’est tellement bizarre. C’est pas du Donjuanisme parce que j’ai pas couché avec tant de filles que ça.

C’est ce moment-là qui fait que tu sens que t’es en vie.

 Les gens bidonnent, te racontent que c’est toujours pareil : un con est un con, que les garçons c’est différent et que les filles, c’est pareil. Les filles, c’est tellement précisément différent là, à chaque fois. C’est pas seulement de l’infidélité. Y’a des filles, même si tu les connais, chaque fois que tu mets la main, tu sens que c’est bizarre, pas gagné. C’est dur à expliquer.

Mais si tu parles de ça aux gens, ils te disent : “Hé, ça va, tu peux commencer à t’habituer, quand même, c’est infantile” ou alors ils se moquent : “Tu dois pas être une bonne affaire au lit.” ce qui est tragiquement drôle quand on sait comment la plupart des gens baise, quand même. Tu vois, cette réaction des gens qui font la moue du genre “j’espère que t’as mieux dans la vie” alors que tu sais que eux, ils ont rien de mieux dans la vie même pas ça. C’est ça le plus grand plaisir, le moment où je sens que la vie, ça vaut tellement la peine – même si c’est trop cher payé. C’est pas Eideguer qui monte sur sa putain de montagne. Non, c’est le visage de la fille, toi qui a un peu peur, qui repousse l’élastique, tu vois ? “Hé, ça va, y’a mieux.” Y’aura rien de mieux dans la vie, et t’as intérêt à t’en satisfaire.

 Et c’est déjà pas mal.

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